Dans la nuit du vendredi 4 juillet, le Sénat a fait disparaitre le cœur de la réforme territoriale telle que présentée par le gouvernement, à savoir la carte des régions et les élections cantonales et régionales prévues pour 2015. Les articles que le Sénat a supprimés seront réintroduits dans le texte que l’Assemblée nationale étudiera dans les semaines à venir.   La réforme territoriale est pourtant un sujet d’une importance primordiale pour le Sénat, qui est, en vertu de la Constitution, le représentant des collectivités territoriales.

 Le renouvellement prochain du Sénat parasite le débat sur la réforme territoriale

Il semble qu’au Sénat, la campagne pour la présidence du Sénat, qui se déroulera à la rentrée, passe avant la discussion du moment. En effet, le Sénat est à moins de trois mois du renouvellement de la moitié de ses effectifs, à l’issue duquel la droite entend bien reconquérir la majorité.

Comme le notait Jacqueline Gourault (UDI-UC, Loir-et-Cher), présidente de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales, « Sans doute le calendrier électoral n’est pas favorable à la réforme, quand la moitié des sénateurs s’inquiètent de leur réélection ». « Nous ne sommes pas à trois mois près », a plaidé pour sa part Eric Doligé (UMP)

Le projet de réforme vidé de sa substance par les sénateurs

Ainsi, vendredi dernier, le Sénat a en premier lieu adopté une série d’amendements visant à rejeter la carte des régions telle que souhaitée par le gouvernement. Puis, le Sénat a adopté un amendement prévoyant que la modification des limites des régions et des départements résulterait des seules délibérations concordantes des assemblées intéressées. Cet amendement permet aussi à un département de se détacher de la région à laquelle il appartient et de rejoindre une autre région limitrophe.

A aussi été voté un amendement garantissant à chaque département une représentation minimale de cinq élus dans les conseils régionaux, pour assurer une meilleure représentativité des territoires ruraux, au lieu d’un seul prévu dans le texte originel du Gouvernement.

Une opposition sénatoriale composite

L’opposition à la réforme territoriale au Sénat est pour le moins hétéroclite puisqu’elle est menée notamment par 184 sénateurs qui ont voté pour le texte vidé de sa substance (UMP, UDI-UC, RDSE – dont les voix sont indispensables au gouvernement pour conserver une majorité). 129 sénateurs ont voté contre le texte, dont les socialistes et les écologistes. Les communistes (CRC) se sont abstenus. Le président PS du Sénat, Jean-Pierre Bel, se désole de cette situation : « Le rejet de la nouvelle carte des régions prive le Sénat de la possibilité de faire entendre sa voix dans le débat sur la réforme territoriale ». Un avis partagé par le président de la commission des lois du Sénat, Jean-Pierre Sueur, qui a déclaré : « Le Sénat s’est tiré une balle dans le pied en rendant cette page blanche et en ne votant rien sur un sujet aussi important que l’organisation territoriale ».

Le PS dénonce une majorité de circonstance qui a anéanti la participation du Sénat à ce débat. Ce n’est pas l’avis du président du groupe UMP du Sénat, Jean-Claude Gaudin, qui considère pour sa part que ce sont le gouvernement et le groupe PS du Sénat qui « portent l’entière responsabilité de cet échec », en raison notamment de leur « manque d’ouverture ».

Vers l’acceptation d’un référendum sur la réforme territoriale ?

Cette nouvelle obstruction émanant de la Haute assemblée relance le débat sur la nécessité d’un référendum à propos de la réforme territoriale. Début juillet, le premier ministre a déclaré que le calendrier de la réforme territoriale était « plus que jamais maintenu ». M. Valls a également assuré que « Cette réforme va se faire, et elle doit se faire (…) malgré tous les conservatismes » ; « Qu’une majorité de sénateurs veuille bloquer une réforme qui est attendue, demandée, qui est nécessaire, ça n’est pas possible (…) nous ne céderons à aucune menace ».

Conformément aux souhaits de l’exécutif, les députés ont  rejeté mercredi soir dernier  à une large majorité de 102 voix contre 27 la motion adoptée au Sénat, demandant l’organisation d’un référendum sur la réforme territoriale. « C’est pour nous un impératif démocratique incontournable car la réforme territoriale s’attaque aux fondements même de l’organisation républicaine de notre pays » », a plaidé Marc Dolez (Front de gauche). Pour Valérie Pécresse, « il y a urgence de demander au peuple de se prononcer sur cette réforme ubuesque ». Les sénateurs PS et écologistes assurent être mobilisés pour défendre le texte en deuxième lecture à l’automne prochain.

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