En 2015, la droite parlementaire conquiert 8 des 17 nouvelles régions ; avec 6.8 millions de voix au second tour et 358 sièges, le Front National a quant à lui opéré une percée historique. Pourtant, selon Luc Rouban, auteur de la note « Les conseillers régionaux en 2015 : première analyse », cette victoire apparente de la droite parlementaire ne serait qu’une gageüre. Après avoir défini le profil socioprofessionnel des nouveaux conseillers régionaux, en comparant les 1910 élus choisis au second tour (13 décembre 2015) à leur homologue de 2010 ; suivant l’absence ou la présence de certains conseillers régionaux sur certaines listes, … , le rapporteur semble mesurer la victoire parlementaire de la droite.

 

  1. Les profils socioprofessionnels

Avec un taux de 24%, les candidats du second tour sont en grande part des acteurs du monde économique. Quoique les profils socioprofessionnels des candidats changent en fonction du premier et du second tour, la proportion de représentants du secteur secondaire – agriculteurs, commerçants / artisans – est assez maigre, avec un taux respectif de 3.7% et 5.4%. Une observation qui s’applique également à la population élue, qui compte 12.7% de professions libérales, 7.7% de patrons et industriels, contre 4.2% d’agriculteurs exploitants et 3.9% d’artisans commerçants.

Du premier au second tour, certains affaissements ont tendance à surprendre : ainsi la part d’ouvriers passe de 3.1% à 1.2% entre les deux tours, tandis qu’elle passe de 11.8% à 9.6% pour les employés du secteur privé. Finalement, ceux-là sont plutôt mal représentés parmi les élus, comptant respectivement 0.7% et 5.7% des élus.

Part privilégiée, les membres issus du secteur public reste stable entre les deux tours (33% à 31.8%), alors que la représentation parmi les élus grimpe à 41.3%. Un taux particulièrement bas, par rapport à la situation de 2010 (51.7%). La chute, selon le Cevipof, s’expliquerait par la croissance d’élus du Front National, dont les représentants élus proviennent moins de ce secteur. Parmi ceux-là, les enseignants sont assez présents, avec un taux de 12.7% d’élus. En revanche, les catégories B et C deviennent plus rares, avec un part atteignant à peine les 4.6% des élus.

  • En somme, parmi les grands groupes sociaux, ce sont les catégories socioprofessionnelles supérieures les mieux représentées, avec un passage de 30% à 40% du premier au second tour, pour atteindre un taux de 60% d’élus.

 

  1. Le poids mineur de l’étiquette politique 

Quel que fut le parti politique, les mêmes mutations des profils des candidats s’observent d’un tour à l’autre. « Les mêmes effets de rétrécissement de la base sociale opèrent entre la candidature du premier tour et l’accès au siège de conseiller régional et cela quelle que soit l’étiquette des listes ou des candidats», souligne le rapport. Globalement, les mêmes tendances s’observent donc dans tous les partis, avec une chute de la part des petits salariés et une explosion des cadres du secteur public (notamment au Front National).

 

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Part en pourcentages de représentants élus aux régionales 2015 issus du secteur public présents dans chaque affiliation politique. © France Renaissance

Pour le rapporteur de la note, cette représentation des catégories professionnelles permet de constater que ce sont encore les candidats aux ressources sociales et professionnelles les plus avantageuses qui sont privilégiés. « C’est ainsi que 50% des élus régionalistes en 2015 appartiennent aux catégories socioprofessionnelles supérieures, tout comme 56% des élus de gauche ou écologies, 68% des élus de droite ou du centre et 48% des élus du Front National », constate-t-on.

 

  • Les renouvellements pour l’année 2015

Par rapport à 2010, les conseillers régionaux de 2015 se démarquent par leur jeunesse : celle-ci se fait surtout tangible parmi les rangs du Front National, où 21% des conseillers ont moins de 34 ans. Sur 27 conseillers âgés de moins de 25 ans, 15 d’entre eux appartiennent à cette maison politique. Globalement, l’âge moyen des élus a peu baissé, passant de 50 ans en 2010 à 49.5 en 2015.

La répartition des conseillers suivant leur appartenance aux classes sociales à quelques peu mutée, avec une hausse globale des élus issus des catégories moyennes.

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Loin du renouvellement attendu, Cevipof déplore que les mutations sociales ne s’opèrent pas dans le milieu des conseillers régionaux. Le rapporteur de la note indique ensuite que c’est parmi les élus du Front National que se dénombrent le plus de personnes issues des catégories populaires puisque sur 274 élus que compte cette catégorie sociale, 105 (38%) appartiennent à cette formation politique.

En ce qui concerne le renouvellement, peu de changements s’opèrent entre les élus sortants et les nouveaux élus régionaux. Rien non plus de très probant à évaluer les mutations en fonction de la réduction du cumul des mandats. Les élus cumulant les fonctions restent nombreux : entre 2015, 3.6% des conseillers sont également députés, 1.3% sont sénateurs et 0.5% sont députés européens. On compte aussi des cumuls en termes de mandats locaux, paradigme que le rapporteur admet ne pas avoir encore renseigné.

En revanche, les personnes sans emplois font une arrivée massive dans le jeu des élections régionales, passant de 1.2% des élus en 2010 à 5.5% en 2015. Parmi les élus Les Républicains et Front National, ils sont particulièrement bien représentés, avec des taux atteignant respectivement 6.3% et 6.7%.

 

 

N.b. Cette note fait la synthèse de la note n°17 (Les conseillers régionaux en 2015, première analyse, janvier 2016) de l’institut Cevipof, par Luc Rouban, Directeur de recherche au CNRS.

aloysia biessy