Le 23 novembre 2016, Bernard Vorms (Président du Conseil de la transaction et de la gestion immobilière) et France Stratégie remettent un rapport au ministre du Logement de de l’Habitat durable, Emmanuelle Cosse. Intitulé « La révolution numérique et le marché du logement », ce rapport a pour but d’apprécier l’impact de la révolution numérique sur l’activité des professions immobilières et de protéger les professionnels du secteur, notamment face à la concurrence internationale. L’étude se concentre sur le marché résidentiel privé.

L’impact de la révolution numérique

Alors que la recherche en ligne permet la comparaison d’un nombre élevé d’informations, la recherche d’un bien immobilier passe de plus en plus par Internet. Selon une enquête réalisée en 2016 par ManPower et Usine Digitale, « 90% des projets immobiliers concrétisés ont débuté sur Internet ». L’activité des agences immobilières n’en souffre cependant pas. Mais si les personnes privées utilisent les facilités de la toile, il en est de même pour les professionnels qui y voient un moyen de création ou d’expansion d’activité.

C’est ainsi que l’on peut observer l’émergence de nouveaux acteurs à l’image des portails d’annonce en ligne. Intimement liés à la révolution numérique, ils se rendent indispensables auprès des agences et facturent leurs services au prix fort. Les Etats-Unis et le Royaume-Uni connaissent un développement plus poussé de ces portails qui captent d’importantes parts de marché. Il s’instaure dans ce cas-là une interdépendance du fait que les portails d’annonce ne peuvent vendre eux-mêmes les biens qu’ils présentent. De même se développent des « réseaux de mandataires » ou « agences non vitrées ». Très présentes sur Internet, ils mettent en contact vendeur et acheteur potentiel mais n’interviennent pas dans la transaction. Ce sont des alternatives « low cost » qui empiètent sur l’activité des agences traditionnelles.

Les agences immobilières n’en restent pas là et se servent également de la toile pour promouvoir leur activité et faciliter la mise en relation avec le client. Quatre services sont communément répandus :

  • La géolocalisation des biens
  • La visite virtuelle
  • L’estimation en ligne
  • Le « Push Agence ». Il s’agit de la réception de la notification d’une offre immobilière que le client reçoit lorsqu’il passe devant l’enseigne d’une agence partenaire.

On remarque également chez le consommateur, de nouvelles manières d’utiliser son logement. Il s’agit souvent du logement d’un proche pour une durée plus ou moins longue, mais aussi de sous-location. Le risque de ce dernier usage est la pratique de prix trop élevés à l’image de ceux utilisés par les « marchands de sommeil ». La jouissance du bien ne passe plus ici par sa possession mais son usage et sa capacité de rendement. D’après une étude IPSOS, la moitié des sondés n’était pas contre l’idée de « louer une chambre de leur logement pour avoir un complément de revenu ». Reste que cette pratique n’est pas encadrée et pose un problème d’information pour le syndic quand il s’agit d’un immeuble, et peut concurrencer la location traditionnelle ou le secteur hôtelier.

 

Comment répondre à cette révolution numérique ?

Onze propositions sont présentées dans ce rapport :

  1. Lever l’insécurité juridique liée à la dématérialisation des documents et des correspondances
  2. Permettre aux syndics de diversifier leurs offres pour s’adapter aux besoins des divers types de copropriété.
  3. Créer un outil d’analyse pour rapprocher l’occurrence des contentieux du type d’exercice professionnel.
  4. Traiter les nouveaux usages de location temporaire en distinguant chacune des situations.
  5. Imposer aux plateformes collaboratives d’assortir chacune des modalités d’occupation définies précédemment d’exigences spécifiques en matière d’information des occupants.
  6. Modifier le statut du portage salarial pour le rendre compatible avec le statut d’agent commercial.
  7. Garantir un égal accès à tous aux données de prix et de loyer.
  8. Inciter les professionnels regroupés autour de Bien’ici* à mettre en place un instrument de suivi des délais de commercialisation, différenciés géographiquement et par type de bien.
  9. Aider les associations de consommateurs à mettre au point un système d’étiquetage informatif des outils d’estimation automatique des prix et des loyers.
  10. Fiabiliser les avis en ligne.
  11. Conduire une étude sur le fonctionnement du marché immobilier dans les principaux pays comparables à la France.

 

Jusqu’à aujourd’hui, on ne constate pas une baisse d’activité et de revenus chez les agences immobilières du fait que les nouveaux acteurs cités plus haut ne peuvent pas réaliser eux-mêmes les ventes et donc, peser à la baisse sur les taux de commission. La vraie concurrence s’exerce dans les systèmes de collecte et d’utilisation des données et favorise l’innovation dans le domaine de la communication par internet.

En résumé, la révolution numérique ne représente pas un danger pour le marché traditionnel de l’immobilier dans la mesure où les professionnels ont su s’y adapter, que ce soit dans leur communication ou dans la proposition de biens. De plus, l’outil internet leur a permis de créer de nouveaux services destinés à faciliter la recherche initiale par le client, et donc, de ne pas subir la concurrence. Si les habitudes des consommateurs évoluent, il reste que les agences immobilières ont toujours le pouvoir d’effectuer les transactions, ce qui leur assure de finaliser les opérations d’achat.

 

 

* : Bien’ici est un site d’annonces immobilières qui réunit les principaux syndicats de professionnels français du secteur

 

NB : Cette note fait la synthèse d’un rapport de France Stratégie de Bernard Vorms rédigé pour le compte du ministère du Logement et de l’Habitat durable et du ministère de l’Économie.

 

aloysia biessy