La loi relative à la transition énergétique  est entrée en vigueur le 17 Août 2015. Dans les mois suivants, les accords de Paris signent l’aboutissement des recherches de la Cop 21. En perspective : réchauffement climatique et transition énergétique adaptée à une croissance nécessaire.

 

La question de la réduction des émissions de dioxyde de carbone (CO₂), visant à minimiser l’impact que ces émissions auraient sur le réchauffement climatique, est alors soulevée, proposition visant à relancer la croissance en ces temps de trouble économique. Les émissions de CO₂ génèrent en effet un coût conséquent et une croissance en hausse, notamment en regard des technologies actuelles, entraîne une augmentation de la diffusion du dioxyde de carbone. Comment conjuguer ces deux objectifs d’abord si antagonistes ?

 

Se placer à l’aune d’une perspective macroéconomique, prenant en compte le secteur énergétique et ses corolaires – secteurs économiques tiers, pourrait permettre l’établissement des liens de causes à effets nécessaires à une bonne appréhension de cette problématique.

 

Quotas d’émission, taxe carbone, taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) : autant de mécanismes qui, selon leur efficience, engendre des coûts considérables. Pour exemple, la taxe carbone projette une politique financière aux impacts importants en termes de PIB et d’emploi. Ainsi, une taxe carbone d’1% du PIB réduit le PIB d’1% environ[1].

 

Les modèles macroéconomiques à long terme et les politiques d’accompagnement visant à maîtriser les coûts de ces modèles, divergent : certains projettent une baisse de l’intensité énergétique, d’autres des substitutions entre énergies, favorisant le développement d’énergies « propres ». La combinaison des deux secteurs auraient pourtant été la réponse la plus efficace…

 

A l’échelle macroéconomique, l’évaluation de la transition énergétique se base sur la dualité entre l’offre et la demande. Une demande importante est opérée à l’égard de quelques secteurs énergivores (transports, bâtiments). Domaines dans lesquels la transition énergétique exigerait une substitution par un changement de mode de transport ou encore une augmentation de l’efficacité énergétique à travers la création de véhicules plus performants énergétiquement et une isolation des constructions. Le mécanisme de substitution tend effectivement à développer une économie circulaire, permettant un recyclage de l’énergie. Idée prometteuse, dont le coût constitue encore une problématique centrale. Le secteur de la recherche et du développement est-il à même de produire des technologies de substitution nécessaires, réellement efficaces et à bas prix ? Car la substitution entre énergies reste un facteur déterminant pour la réduction des émissions de CO₂.

 

Du côté de l’offre, la production d’énergie ne représente que 12% des émissions nationales. Dans ce secteur, une décarbonation quasi totale serait possible via une baisse de l’intensité énergétique du PIB – et subsidiairement, du PIB lui-même. Troquer la croissance contre la transition énergétique n’apparaît cependant pas comme une solution adéquate.

 

Suivre les simples mécanismes de l’économie ne peut enjoindre les politiques publiques à jouer leur rôle dans la transition énergétique. Si plusieurs solutions ont pu être envisagées, aucune ne paraît pour l’heure satisfaisante ; certaines semblent même susceptibles d’aggraver la situation ! L’établissement de normes, dans un pays où la norme est omniprésente paraît inane. La « multiplication cancéreuse des lois » sonne comme « un aveu de faiblesse consistant à inventer tous les matins de nouvelles lois particulières parce qu’on ne parvient pas à faire respecter les lois déjà existantes » (Philippe Muray). L’établissement de subventions ne présente pas en aucun cas une issue raisonnable, dans la mesure où une augmentation des dépenses publiques impliquera une augmentation de la fiscalité dont la lourdeur constitue déjà un frein dans la politique actuelle française. En témoigne la fiscalité énergétique, mesure proposée pour remédier à la question de la transition énergétique et dont la réponse apparaît hypocrite, tant le lien entre fiscalité et dioxyde de carbone est mince.

 

Avec un faible potentiel de substituabilité, la consommation énergétique se trouve face à un écueil. Conséquence d’un secteur de recherche et développement en ralentissement en France, cette lacune entraîne une hausse des prix de l’énergie, bridant le pouvoir d’achat des ménages – consommateurs prolifiques de l’énergie.

 

La transition énergétique à également un impact sur l’emploi. Ses échos sur les coûts de production vont irrémédiablement engendrer une augmentation des prix sur les secteurs intensifs en consommation d’énergie. La demande émise à l’égard de leurs produits risque donc une chute libre, entraînant l’inéluctable diminution de l’emploi dans ce secteur. A l’inverse, les investissements et les nouvelles activités liées à la recherche et au développement permettant une substituabilité des énergies sont susceptibles de créer des emplois.

 

Le constat est sans appel : il est nécessaire de mettre en place une politique structurelle d’aide à la recherche et au développement dans tous les secteurs – et non les seuls secteurs au cœur de la transition énergétique.

 

Si nombre d’objectifs sont fixés, eu égard au caractère macroéconomique de la question, beaucoup d’aléas entrent en jeu, ouvrant la porte à d’innombrables de variables, d’incertitudes sous-jacentes. La mise en place d’une politique structurelle d’accompagnement de la transition énergétique nécessite que soit programmée parallèlement une politique conjoncturelle qui permettrait l’amortissement un effet récessif trop prononcé. Une telle politique ne constituerait-elle pas une sorte « d’accompagnement de l’accompagnement » ?

 

Afin de faire en sorte conjoindre croissance et transition énergétique, opter pour une approche globale à l’aune de la macroéconomie permettrait de faire de ce domaine un outil en capacité de distiller dans chaque domaine sectoriel des enjeux de transition énergétique.

Nb. Cette note propose un compte-rendu critique de la lettre de France Stratégie (n°43, 26 février 2016) http://www.strategie.gouv.fr/publications/modeles-macroeconomiques-transition-energetique

 

 

[1] Source : simulations de Boitier et al. (2015).

aloysia biessy