François Hollande a finalement cédé aux pressions étatsunienne et européenne. Washington, via son ambassadeur auprès de l’Union européenne, déclarait que « Cette vente n’est pas la bienvenue compte tenu de ce qui se passe dans cette partie du monde », faisant référence au conflit ukrainien. Même position pour le président du groupe du Parti populaire européen, l’Allemand Manfred Weber : « la France doit interrompre immédiatement la livraison des deux porte-hélicoptères français Mistral à la Russie […] Dans le contexte de tension sans précédent avec la Russie, alors que l’Union européenne tente de faire front et de parler d’une seule voix , il est totalement impensable que la France poursuive la livraison de ses porte-hélicoptères Mistral à la Russie et forme des soldats russes au maniement de ceux-ci. Cette hypocrisie a suffisamment duré. »

La livraison du navire Mistral a donc été suspendue par l’Elysée. Pourtant, nous avons cru assister jusqu’au dernier moment à un sursaut de courage de la part du président de la République, qui jusqu’à très récemment tenait bon sur ses positions.

 

Une décision à rebours du contexte géopolitique

Cette décision est purement idéologique et déconnectée de la réalité. Elle intervient alors même que les protagonistes du conflit ukrainien sont parvenus à un accord de cessez-le-feu. Le président ukrainien Petro Porochenko a signé un protocole à Minsk avec les régions séparatistes. Cet accord a pu se faire grâce à l’intermédiaire de la Russie et de son président, Vladimir Poutine, celui-là même que l’Occident souhaite punir. L’exécutif voudrait rajouter de l’huile sur le feu qu’elle ne s’y prendrait pas autrement.

 

Une décision fragilisant la position de la France à l’international

Ce brusque revirement met en doute la crédibilité de la France et remet en cause sa capacité à tenir parole. En privé, le patron de l’une des grandes entreprises françaises de l’armement ne cache pas son inquiétude : « en cas d’annulation (NDLR : de la vente du Mistral) par Paris, nos grands clients se sentiront à la merci d’une décision politique unilatérale de la France. » De nombreux observateurs font le lien avec la négociation en cours prévoyant la livraison de 126 avions Rafales avec l’Inde. Pour la première fois, Dassault Aviation pourrait exporter son produit après de nombreuses tentatives infructueuses. Il ne reste plus qu’à espérer que les discussions avec New-Dehli ne soient pas interrompues et suivent leur cours.

Une décision contraire aux intérêts de la France

L’ancien eurodéputé Philippe de Villiers, qui a récemment rencontré Vladimir Poutine, déclarait dans un communiqué qu’ « en plus du millier d’emplois liés aux contrats de fourniture des bateaux Mistral mis en danger par une telle décision, c’est toute l’industrie française à Moscou qui risquerait d’en subir les conséquences au moment même où notre industrie est parvenue à développer durablement ses activités en Russie dans un climat de confiance, créant, entre les 1200 entreprises françaises présentes sur le territoire russe, près de 100 000 emplois indirects en France générés par les projets russes de la France. ». Cette déclaration concorde avec l’analyse du député UMP Thierry Mariani, qui déplore que « ce sont des milliers d’emplois qui peuvent se retrouver menacés. »

 

La réaction des syndicats

Les syndicats des chantiers navals de Saint-Nazaire sont eux aussi sous le choc de l’annonce de François Hollande et sont dans l’incompréhension. « Si l’annonce du président se concluait par l’arrêt de la construction, ce seraient des centaines d’emplois qui seraient mis en difficulté aussi bien chez STX que chez les sous-traitants. C’est inacceptable, intolérable », selon Jean-Marc Perez, secrétaire adjoint FO, syndicat minoritaire chez STX, qui sous-traite la construction des deux bâtiments pour le compte de DCNS. D’après un autre cadre du syndicat, « Il faut absolument construire le deuxième BPC (NDLR : Bâtiments de Projection et de Commandement), c’est un impératif. […] Sans ça, 300 salariés de STX pourraient se retrouver au chômage partiel, sans compter ceux des sous-traitants. »

 

Répercussions économiques

Le contrat de vente avec la Russie des deux Mistral signé en 2011 par Nicolas Sarkozy s’élève à 1,2 milliards d’euros. En plus de la perte occasionnée, la non-livraison de cette commande signifierait que la France devrait s’acquitter de frais de pénalités très élevés. Ils ont été évalués à plus de 250 millions d’euros. Le coût total de cette annulation de commande avoisinerait donc les 1,5 milliards d’euros, ce qui pèserait lourd dans notre balance commerciale, déjà lourdement déficitaire. Au 2e trimestre 2014, le déficit commercial français était en hausse de 0,8% sur un an, atteignant les moins 14,7 milliards d’euros, et de 0,7% par rapport au 1er trimestre 2014.

Conclusion

Cette décision n’a donc aucun avantage, à part de satisfaire quelques idéologues voulant à tout prix faire de la Russie un ennemi. Nous sommes loin de la vision du Général De Gaulle qui entendait maintenir l’indépendance de la France, refusant d’entrer dans l’OTAN pour ne pas subir les pressions américaines, et n’hésitant pas à faire la politique de la chaise vide à Bruxelles quand il le fallait. Le refus de livrer les Mistral à la Russie est une trahison vis-à-vis de la France et démontre une fois de plus l’incapacité de François Hollande à faire les bon choix dans l’intérêt de notre pays et à faire face aux pressions extérieures. Preuve supplémentaire s’il en est que le centre décisionnaire de l’exécutif ne se trouve plus à Paris mais se situe à Washington et à Bruxelles.

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