Après les événements de janvier 2015, et ceux de novembre de la même année, Patrick Autréaux ancien psychiatre d’urgence, publie une brochure de l’Institut Diderot: Je suis Charlie. Un an après. Il y explique sa réaction, sa réflexion, son analyse des troubles et des manifestations expressives des sentiments de compassion, de peur et de haine, qui ont suivi les attentats, ainsi que le rôle de l’écrivain sur les masses des lecteurs.

Il reproche de façon virulente à notre temps d’ « [exiger] de tout de suite comprendre, [de réclamer] des causes et des réponses pas forcément la vérité mais un immédiat pansement »1. C’est ce que favorisent la presse et la littérature au regard des événements qui ne sont pas terminés car nous en subissons encore les conséquences.

Ainsi, il est dégoûté par la démesure de la formule « Je suis Charlie » utilisée par tous et vidée de son sens, jusqu’à l’opportunisme de certains commerces qui l’employaient comme un outil de marketing. «L’opportunisme pour le profit et la guerre des marketings étaient décidément des turbines que rien n’enrayait »2. Cela afin de faire croire au bonheur matériel qui asservit et anéantit les esprits. Il cite et affirme alors comme Bernanos qui disait en 1945 : « On ne comprend rien à la civilisation moderne si l’on n’admet pas d’abord qu’elle est une conspiration espèce de vie intérieure »3.

Il dit être marqué par le venin de la haine qui se propage aussi depuis quelques années : les attentats terroristes étant en grande partie responsables et créant des clivages entres les différentes ethnies, peuples et religions.

Cette haine, inhérente à chaque être humain, est aussi fortement motivée par la peur contrairement à ce qui était écrit sur certains panneaux brandis lors de manifestations comme celles du 11 janvier 2015, où il était inscrit « nous n’avons pas peur ». Lui-même se sent envahi par cette peur ambiante (p.16).

Et personne ne se démarque. La haine engendre la haine et les hommes l’ont prouvé par des symptômes comme l’antisémitisme, la haine contre le « pédés »…(p.23) C’est cela qui, selon Patrick Antréaux, mine notre société, étant à l’origine du terrorisme, et de la peur chez les victimes.

Il termine en expliquant que si l’on écrit à propos de catastrophes ou autres, il faut tenter que ces livres soient « résistants aux séismes », c’est-à-dire qu’ils gardent leur valeur au-delà des catastrophes, puissent être lus avec intérêt des années après, qu’ils se démarquent des nombreuses publications qui suivent ce genre d’événements.

 

1 Je suis Charlie. Un an après, Patrick Autréaux, Notes de l’Institut Diderot, décembre 2015, p.14.

2 Op. cit., p.15.

3 Op., cit. p.15.

 

Source : Je suis Charlie, un an après, par Patrick Autréaux, note de l’Institut Diderot, décembre 2015

aloysia biessy