La classe moyenne, définie comme l’ensemble des personnes dont le revenu (après prestations sociales et avant impôts) est compris entre deux tiers et deux fois le revenu médian, regroupe la moitié de la population adulte aux États-Unis, contre plus des deux tiers en France. Ainsi la part de la population faisant partie de la classe moyenne est supérieure en France par rapport aux Etats-Unis. Si les classes moyennes ont connu une explosion durant les 30 glorieuses, elles subissent aujourd’hui quelques difficultés.

On observe ainsi une baisse de régime de la classe moyenne américaine depuis près de 20 ans ; en France cet élan est deux fois moindre. Si aux Etats-Unis, ce tassement s’est fait davantage au profit des hauts revenus (2,2 points) que des bas revenus (1,4 point), en France, l’évolution est inverse (0,9 point pour les bas revenus, 0,5 pour les hauts revenus). L’érosion des classes moyennes françaises et américaines s’est donc opérée au profit de la classe hauts-revenus et de la classe bas-revenus, mais dans des proportions différentes. Aux Etats-Unis, c’est la classe la plus aisée qui a le plus profité de cette et de la baisse du revenu de la classe moyenne subsidiaire.

Les variables âge, diplôme, situation familiale, et lieu de naissance sont plus déterminantes aux Etats-Unis qu’en France en termes de probabilité d’appartenir à une classe. En France, on observe une dégradation de probabilité d’appartenir à la classe des hauts-revenus quel que soit le niveau de diplôme, du fait de la progression générale de la qualification. Ce phénomène n’est pas acquis aux Etats-Unis, où la probabilité d’appartenir à la classe des bas-revenus est largement supérieure lorsqu’on a un niveau de diplôme inférieur au bac qu’en France (68,1% contre 25,2%). Dans ce pays, les hommes ont vu leur taux de rendement de l’éducation ralentir contrairement aux USA entre 1994 et 2001.

La répartition des revenus selon les classes diffère beaucoup entre France et Etats-Unis. En 1996 la classe moyenne possédait 42,3% des revenus aux USA et 24,6% en France alors qu’en 2012, elle en possède 47,3% (Etats-Unis) et 28,5 % (France). Ainsi la classe moyenne aux Etats-Unis a pris 5 points en 15 ans contre 4 points en France, alors que la première avait déjà un poids largement plus élevé. La part de revenus disposée par cette classe est largement inférieure à son poids dans la société : d’où une augmentation des inégalités de revenus dans les deux pays. L’écart entre la classe à hauts-revenus et la classe à bas-revenus s’est d’ailleurs amplifié, particulièrement aux USA. La France est l’un des rares pays à avoir connu une augmentation de sa classe moyenne entre les années 80 et 2009 selon plusieurs études[1]. Aux Etats-Unis, le processus est ancien. La grande différence entre ces deux pays réside dans le fait que les classes françaises ont connu depuis les années 80 un accroissement de leurs revenus (en moyenne 20% environ) alors que les classes américaines sont en quasi-stagnation (2% environ). Ce dernier phénomène est dû à la captation du PIB par les plus hauts revenus.

Au niveau des classes d’âge, bien qu’ils restent les mieux lotis, les 45-64 ans connaissent une dégradation de leur situation dans les deux pays. Il y a en France un transfert des hauts revenus et de la classe moyenne vers les bas-revenus et ce sont désormais les 18-29 ans qui connaissent la situation la plus précaire en France. La situation familiale influe aussi. En France comme aux États-Unis, entre 1996 et 2012, les personnes mariées sans enfants à la maison sont dans une situation plus favorable que les personnes mariées avec enfants, et surtout que les personnes non mariées en général. Les familles monoparentales connaissent la situation la plus précaire avec une plus forte chance d’appartenir à la classe des bas revenus (30% contre 22% de moyenne) que celle d’appartenir à la classe hauts-revenus (8,9% contre 10,5%). Le lieu de naissance à également une influence dans les deux pays. Aux Etats-Unis et surtout en France, les étrangers ont plus de chance d’appartenir à la classe des bas-revenus que les personnes nées dans le pays. En revanche les étrangers ont légèrement plus de chance d’appartenir à la classe hauts-revenus en France qu’aux USA. Néanmoins, les USA voient leur situation s’améliorer alors que celle de la France se dégrade.

 

*Cette note fait la synthèse de la note n°41 de France Stratégie, « Un Américain sur deux, deux français sur trois » concernant le statut des classes moyennes.

 

[1] Dominique Goux et Éric Maurin, Louis Chauvel…

aloysia biessy