Le Sénat a adopté le 12 juin la proposition de loi sur l’encadrement des stages. Cette proposition de loi prévoit entre autre une hausse des indemnités à partir de septembre 2015. Cette proposition part de l’idée honorable de limiter une relative exploitation de stagiaires et un abus de ce statut par un certain nombre d’entreprises. Le nombre de stagiaires en France a explosé passant de 600 000 en 2006 à 1,6 million en 2012, une extrême majorité des formations universitaires exigeant à présent un stage pour valider les études. Toutefois elle suscite de nombreux mécontentements et craintes aussi bien chez les entrepreneurs qui se sentent menacés que chez les étudiants qui craignent de ne plus pouvoir trouver de stage du fait de cette loi. Si la « gauche plurielle » a voté pour ce texte, l’UDI s’est abstenue et  l’UMP a voté contre, dénonçant un texte « dissuasif » pour les entreprises. Le projet doit revenir prochainement à l’Assemblée nationale.

Le projet

Visant à limiter les dérives et à favoriser le stagiaire ce projet de loi s’articule autour de plusieurs axes. Les obligations de l’organisme d’accueil sont reprécisées, avec hausse des indemnités (de 436 à 523 euros) à partir de septembre 2015, pour les stages dépassant deux mois (et plus juste supérieurs à un mois comme souhaité initialement. Aucun stage ne doit viser à exécuter une tâche régulière en entreprise correspondant à un emploi permanent ou à remplacer un salarié. Surtout le nombre de stagiaires par semaine va être limité en fonction de l’effectif de l’organisme d’accueil, avec l’instauration d’un quota qui reste à déterminer.

Les stages sont intégrés à un cursus pédagogique : un volume minimal de formation en établissement doit être assuré afin d’éviter les multiplications d’achat de conventions de stage.

Les droits et protections du stagiaire sont redéfinis. Les stagiaires bénéficient de la protection du code du travail au même titre que les salariés. Pour les stages de plus de deux mois, la convention de stage doit prévoir la possibilité de congés et d’autorisation d’absences. Le stage ne peut pas durer plus de six mois. Le temps de travail du stagiaire est aligné sur celui des employés, il ne peut être supérieur. Enfin le stagiaire a accès au restaurant de l’entreprise ou aux titres-restaurants et il bénéficie de la prise en charge de ses frais de transport. Une amende de 2000 euros par stagiaire est prévue en cas de manquement, 4000 en cas de récidive.

Par ailleurs la limitation de la durée de travail à 35 h n’est pas obligatoire pour les stages en droit et dans le monde agricole. Pour des spécificités liées à leur secteur, les employeurs du monde agricole sont exemptés de rémunérer leurs stagiaires au-delà de deux mois.

L’opposition des entreprises

Il est certain que des abus existent au sein de sociétés qui usent et abusent du statut de stagiaire, notamment pour éviter les recrutements sous contrat de travail. Mais on peut y voir la conséquence directe du manque de flexibilité de notre droit du travail, ainsi que de l’évolution du marché du travail. Les relations de travail se sont durcies et sont peu propices à une confiance des employeurs dans un recrutement à l’aveugle de candidats qu’ils n’ont pas pu tester sur une longue période. Le stage est pour l’employeur un moyen de s’assurer des qualités d’un possible futur employé.

Les entreprises se sont engagées à faire du stage une « porte d’entrée sur le marché du travail », avec une telle loi elles l’annoncent, cette porte pourrait bien se refermer.

Cette disposition vient s’ajouter à un cadre déjà extrêmement lourd et va aggraver la situation des entreprises déjà rendue difficile par des coûts de gestion très lourds. Cette mesure est perçue comme une défiance envers les entreprises et va à l’encontre de l’intérêt général.

Une loi nuisible aux étudiants

La quasi-totalité des formations universitaires exige désormais au moins un stage dans le monde actif, afin de valider la formation. Ce projet de loi, s’il vise à protéger les étudiants stagiaires va au contraire les pénaliser. Car avant d’être éventuellement exploité, il faut arriver à trouver un stage, ce qui est de plus en plus ardu.

La limitation du nombre de stagiaires selon les effectifs de l’entreprise et l’augmentation de la gratification entraineront inévitablement une réduction des offres de stages si nécessaires aux étudiants. Ce qui devait être une première expérience et une porte d’entrée dans le monde du travail va devenir une quête sans fin. Il y aura une concurrence inutile entre les candidats aux stages et la validation de leur formation deviendra plus qu’incertaine.

A trop vouloir protéger les stagiaires on est en train de fermer les vannes de ce recrutement qui reste un fort moyen d’insertion professionnelle.

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