Le parquet a fait appel le 02 juillet de l’acquittement du docteur Bonnemaison, accusé du meurtre par empoisonnement de sept personnes. La nécessité de l’appel nous interroge sur la décision de « justice » ayant choisi l’acquittement tout en reconnaissant ses actes. Le docteur Bonnemaison, sincère, est en cette période de débat, l’exemple même des terribles dérives qui auront immanquablement lieu en cas de légalisation de l’euthanasie.  Et pourtant la cour d’assise de Pau a déclaré « S’il apparaît que Monsieur Bonnemaison a procédé lui-même à ces injections, qu’il n’en a pas informé l’équipe soignante, qu’il n’a pas renseigné le dossier médical des patients, et qu’il n’en a pas informé les familles à chaque fois, pour autant, il n’est pas démontré qu’en procédant à ces injections, il avait l’intention de donner la mort aux patients au sens de l’article 221-5 du code pénal. » Pourtant l’accusé reconnaissait lui-même la volonté de mettre un terme à la vie de ses patients et le dépassement de la loi Leonetti.

Les faits

Le docteur Bonnemaison, urgentiste à Bayonne à, entre mars 2010 et juillet 2011, mis fin à la vie de sept de ses patients. Il a lui-même reconnu avoir « abrégé la vie » de certains de ses patients qui étaient en phase terminale, en utilisant des injections létales, parfois autorisée par la loi Leonetti si l’objectif premier est d’atténuer les souffrances même si cela peut entrainer la mort comme effet secondaire. Surtout il a reconnu avoir utilisé du curare, poison ne laissant aucun doute sur la volonté première et la conscience de tuer. Par cela il reconnait lui-même être sorti de la loi.

De plus le médecin a pris ses décisions seul, sans demande des patients et sans même consulter et avertir les familles qui ont été mises devant le fait accompli. Sur les sept patients, six familles n’ont pas porté plainte, mais le fils des dernières victimes s’est lui constitué partie civile, considérant qu’on lui a volé ses derniers instants avec sa mère en le laissant hors du processus de décision. Des infirmières ont fait part de leur désarroi, ne sachant pas comment accompagner les patients après la découverte des piqures.

Le docteur Bonnemaison a donc outrepassé le pouvoir qui lui était accordé par la loi Leonetti, en agissant seul, sans « décision collégiale », sans avis du malade en fin de vie et de sa famille et en procédant à des euthanasies par injections de produits destinés à tuer tels que le curare. Il aurait de plus estimé de bonne foi que ses patients « souffraient physiquement et psychiquement », n’en étant donc pas certain. Pourtant bien que reconnu responsable de ces actes et de ne pas avoir respecté la loi, il a été acquitté en première instance.

Un verdict incompréhensible

Le parquet avait requis cinq ans de prison avec sursis, peine déjà très clémente pour une « atteinte à la vie » de sept patients, la cour d’assise de Pau a prononcé un acquittement salué par des effusions de joie chez les proches de l’accusé en occultant la douleur des familles touchées et la réalité de l’affaire jugée.

Le docteur Bonnemaison était conscient de ce qu’il faisait, il abrégeait volontairement des agonies et il savait qu’il enfreignait la loi. Il a déclaré à l’expert psychiatrique « J’ai agi en conscience, mais je sais que je serai condamné. Car sinon, cela légaliserait l’euthanasie. » Il a répété l’opération sept fois en un an. Il l’a confirmé pendant le procès.

Les débats ont mis à jour le fait que les ressorts de ses actes étaient louables, mais mal dirigés. La sanction peut effectivement être adaptée, mais ne pas condamner un homme par ce qu’il a agi par compassion est incompréhensible et donne un très mauvais signal. La Justice française a validé le fait que la loi pouvait n’être pas respectée sans que l’on soit condamné, quand bien même cette transgression a conduit à la mort intentionnelle de sept personnes.

La Justice est là pour juger un homme, ses actes et pas un principe. Elle est là pour rendre justice, pas pour la compassion. Le consentement de la victime n’est jamais exonératoire en droit pénal, l’excuse des familles rétrospectivement consentantes ne peut en aucun cas en être un.

La tribune de l’euthanasie

Ce procès a pris un caractère éminemment politique. Ses avocats l’avaient annoncé, « ce procès sera l’occasion de poser les vraies questions sur l’euthanasie devant un juré populaire.» Se sont alors succédés à la barre des soutiens de poids pour l’accusé, les médecins et hommes politiques Bernard Kouchner et Michèle Delaunay, et surtout Jean Leonetti rapporteur de la loi actuelle relative aux droits des malades et à la fin de vie et le professeur Didier Sicard, fournisseur du dernier rapport sur la fin de vie qui préconise notamment l’autorisation du suicide médicalement assisté. Tous ont soulevé la volonté du docteur Bonnemaison de faire pour le mieux et la nécessité de revoir la Loi Leonetti. Pour eux cet exemple est la preuve que la loi ne va pas assez loin en matière d’euthanasie.

Une nouvelle fois plutôt que de condamner des actes répréhensible, on a jugé que le docteur Bonnemaison n’était  «ni un meurtrier, ni un empoisonneur » et que si la loi jouait contre lui, il fallait donc changer la loi qui empêchait des « actes de charité ». Ces actes n’ont pourtant ni été demandé par les victimes, ni par leurs familles, ni requis par un état de souffrance évident. Le parquet général de Pau à bien évidemment fait appel de cette décision terrible.

Les réactions politiques

Suite à cet acquittement les réactions politiques ont été diverses, entre adhésion, gène et récupération ou effarement. Si Corinne Lepage y voit une « bonne nouvelle », Stéphane Le Foll, porte-parole du gouvernement, sans se prononcer sur le jugement a estimé que l’affaire Nicolas Bonnemaison «confortait» la volonté du gouvernement de «faire évoluer le cadre législatif». Pour lui il faut le faire « avec un consensus» le «plus large possible» au Parlement, estimant que «par rapport à la loi Leonetti qui existe aujourd’hui des améliorations [sont] à apporter».

Marisol Touraine, ministre des Affaires sociales et de la santé a simplement déclaré qu’il ne lui appartenait pas «de commenter des décisions de justice» et que le gouvernement  allait « donner un nouveau cadre législatif à la fin de vie ».

S’il a défendu le docteur Bonnemaison, jugeant qu’il n’était « pas un assassin », Jean Leonetti déclaré juste avant l’acquittement, être « terrifié qu’un jour on puisse dire que finalement c’est normal qu’un médecin puisse rentrer dans une chambre, décider que le vie de la personne qui est en face de lui ne mérite plus d’être vécue et qu’il injecte un produit mortel ».

Enfin des voix se sont élevées contre cette décision de justice incompréhensible, Marion Maréchal-Le Pen a déclaré que « la Justice délivrait un permis de tuer sous les applaudissements de la gauche », tandis que Bruno Retailleau s’interrogeait sur le message donné, permettant de « transgresser la loi et se passer de l’avis des familles ».

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